Accord(s) du gouvernement : quelles mesures fiscales existent, existeront et/ou pourraient exister ?
Accord(s) du gouvernement : quelles mesures fiscales existent, existeront et/ou pourraient exister ?
Entre effets d’annonce, accords politiques, (avant-)projets de loi et mesures fiscales déjà en vigueur : difficile d’y voir clair !
Solis Law Firm fait le point pour vous au 04.09.2025.
1. Loi-programme du 18 juillet 2025
La loi-programme du 18 juillet 2025 a été publiée au Moniteur belge du 29 juillet 2025 et la plupart des mesures fiscales qu’elle contient sont déjà entrées en vigueur.
A partir de l’exercice d’imposition 2026 (et donc depuis le 1er janvier 2025 pour les sociétés qui clôturent leur exercice par année civile) :
- La condition de participation pour bénéficier de la déduction des Revenus Définitivement Taxés (RDT) est renforcée. Dans le chef des sociétés-actionnaires, autres que les petites sociétés, leur participation d’une valeur d’acquisition d’au moins 2,5 millions d’euros mais inférieure à 10% doit désormais avoir la nature d’une « immobilisation financière » pour bénéficier du régime.
- L’exonération du précompte mobilier sur dividendes applicable aux sociétés étrangères qui ont une participation inférieure à 10% dans une société belge mais dont la valeur d’acquisition est d’au moins 2,5 millions est renforcée de la même manière. Sauf si elles qualifient de petites sociétés, leur participation doit désormais avoir le nature de « participation financière » pour pouvoir prétendre à cette exonération.
Depuis le 29 juillet 2025 :
- La taxe d’embarquement pour les trajets en avion dont la destination n’est pas située à plus de 500 km est de 10 €. Elle est de 5 € pour les destinations plus éloignées.
- Devenir belge (acquisition de nationalité ou naturalisation) nécessite de s’acquitter de 1.000 EUR de droits d’enregistrement (contre 150 € antérieurement). Ce montant sera par ailleurs indexé annuellement.
- Le régime fiscal pour les « carried interest » perçus par une personne physique est davantage sécurisé. Ils sont désormais expressément exclus des revenus professionnels et sont imposables au titre de revenus mobiliers au taux de 25%.
- Exit tax : les actionnaires d’une société qui quitte la Belgique ou qui, dans le cadre d’une restructuration (fusion, scission ou opération assimilée) transfère des actifs à l’étranger, sont désormais imposables à l’impôt des personnes physiques sur un dividende fictif de liquidation. (Jusqu’à présent, l’ardoise fiscale d’une telle opération n’intervenait qu’au niveau de la société).
- L’accroissement d’impôt de 10% ne peut plus être appliqué en cas de première infraction commise de bonne foi. La bonne foi est par ailleurs présumée, sauf en cas d’imposition d’office. Cette première infraction prend cependant rang. La seconde infraction (même commise de bonne foi) sera ainsi sanctionnée d’un accroissement de 20%.
- Deux présomptions légales d’abus fiscal en matière de taxe sur les comptes-titres sont entrées en vigueur, à savoir :
- Le fait de convertir des instruments financiers inscrits sur un comptes-titres en instruments non-inscrits sur un tel compte. Est typiquement visé la conversion d’actions détenues sur un compte-titres en actions nominatives inscrites dans un registre des actionnaires ;
- Le fait de transférer des instruments financiers d’un compte-titres d’une valeur supérieure à 1.000.000 EUR vers un ou plusieurs autres comptes-tires au nom du même titulaire ou cotitulaire.
Ces présomptions sont réfragables. En clair, il demeure possible de démontrer l’absence d’abus.
- Le taux réduit de TVA à 6% pour la vente de logements ayant fait l’objet d’une démolition-reconstruction est pérennisé dans le cadre d’un nouveau régime permanent qui, notamment, limite la superficie des habitations éligibles à 175m², contre 200m² auparavant. (Une tolérance administrative s’applique par ailleurs aux mesures transitoires qui s’appliquaient jusqu’au 30 juin 2025).
- Les opérations de fourniture et d’installation « de tout ou partie » d’un chauffage central alimenté par des combustibles fossiles ne bénéficient plus du taux réduit de 6% applicable à la rénovation des logements privés de plus de 10 ans. Elles subissent ainsi désormais le taux ordinaire de 21%.
Depuis le 29 juillet 2025 pour la réserve de liquidation et le 08 août 2025 pour le VVPRbis :
- Les régimes de réserve de liquidation et de VVPRbis, dont peuvent bénéficier sous conditions les petites sociétés, sont davantage harmonisés.
Le régime VVPRbis permet de distribuer un dividende au taux de 15% (au lieu de 30%) à partir du troisième exercice suivant l’apport qualifiant. Le taux était de 20% en cas de distribution lors du deuxième exercice suivant ledit apport. Ce taux VVPRbis de 20% est progressivement supprimé à partir du 08 août 2025.
La constitution d’une réserve de liquidation engendre une cotisation distincte à l’ISOC de 10%. Après une période d’attente de 5 ans, elle peut être distribuée moyennant un précompte mobilier de 5%, ce qui représente un charge fiscale totale de 13,64%.
Depuis le 29 juillet, le délai d’attente pour distribuer une réserver de liquidation passe de 5 à 3 ans et le taux de précompte est porté à 6,5%, ce qui engendre une charge fiscale totale de 15% à l’instar du régime VVPRbis. Les réserves de liquidation constituées avant le 1er janvier 2026 peuvent toujours être distribuées au taux de 5% après 5 ans. Les réserves existantes qui ont été conservées entre 3 et 5 ans peuvent toutefois déjà être distribuées au taux de 6,5%.
Depuis le 8 août :
- Une nouvelle procédure permanente de régularisation unique (la 5e) est entrée en vigueur ; la Déclaration Libératoire Unique quinquies ou DLU5.
Le coût fiscal de cette DLU5 se résume comme suit :
- Pour les revenus non prescrits fiscalement : l’impôt qui aurait été normalement dû + une pénalité de 30% (contre 25% lors de DLU4) ;
- Pour ce qui est fiscalement prescrit : un prélèvement de 45% (contre 40% lors de la DLU4).
Pour les régularisations liées à des impôts régionaux (dont en particulier des droits de succession), il faudra attendre la conclusion d’accords de coopération entre le fédéral et les régions.
2. Projet de loi portant des dispositions diverses
Le gouvernement Arizona s’est accordé sur un projet de loi fourre-tout dont le texte a été déposé à la chambre le 03.07.2025. Il y est toujours en discussion.
Les principales mesures fiscales envisagées par ce texte sont les suivantes :
- Améliorations/assouplissements du régime des impatriés (augmentation des frais propres à l’employeur et réduction de la rémunération brute minimale), du régime des flexi-jobs (augmentation de plafond annuel de la quotité exonérée), des ressources maximales pour demeurer une personne à charge, du régime fiscal applicables aux véhicules hybrides (pour les indépendants uniquement…).
- Doublement du crédit d’impôt applicable à l’augmentation des fonds propres des indépendants.
- Plusieurs améliorations de la déduction pour investissements (DPI) dont :
- la suppression des limitations de déduction en cas de report ;
- la suppression de l’interdiction du cumul avec les aides régionales ;
- l’harmonisation à 40% du taux de déduction des DPI majorées thématiques pour toutes les sociétés (petites ou grandes).
- Retour (partiel) en arrière en matière de délais d’investigation et d’imposition. Ceux-ci avaient été considérablement augmentés et multipliés à partir de l’exercice d’imposition 2023. Il est envisagé, à partir de ce même exercice 2023, de ramener le délai pour fraude de 10 ans à 7 ans, de rétablir le délai classique de 3 ans et de conserver un délai de 4 ans en cas de déclaration tardive et/ou complexe. Exit donc le délai de 6 ans et celui de 10 ans sans fraude. La notification préalable d’indices fraudes serait par ailleurs rétablie dans sa version précédente.
Le délai de prescription de l’action en recouvrement de la TVA en cas de fraude serait également ramené de 10 à 7 ans.
- Application de la déduction RDT de l’année à la partie du montant d’un transfert intragroupe dépassant la perte professionnelle (soit une mise en conformité avec la jurisprudence européenne).
- Suppression, dès l’exercice d’imposition 2026 (et donc de l’année 2025) de la déduction des intérêts sur emprunts immobiliers (autre que relatifs à l’habitation propre) et suppression de la plupart des autres avantages fédéraux (anciens) liés à l’immobilier (réduction liée aux intérêts des prêts verts, réduction majorée pour l’épargne-logement, …).
- Réduction progressive de la déduction (et de l’imposition) des rentes alimentaires de 80% à 70% dès 2025, 60% dès 2026 à 50% à partir de 2027.
- Gel de l’indexation d’une série de dépenses fiscales aux montants tels qu’indexés pour l’exercice d’imposition 2025 (réduction pour l’épargne long-terme, l’épargne-pension, les libéralités, etc.)
- « Simplification de la déclaration fiscale » via la suppression progressive de nombreux avantages fiscaux.
Cela viserait notamment les exonérations liées à l’intervention de l’employeur dans l’achat d’un PC, aux plus-values sur véhicules d’entreprise, pour passif social, pour stage en entreprise, pour personnel supplémentaire à bas salaire, les réductions d’impôt en cas de moins-value sur le partage de l’avoir social d’une Pricaf privée, pour l’acquisition d’un véhicule électrique, pour les dépenses consacrées à un fonds de développement, pour les rémunération d’employés de maison, pour les dépenses dans le cadre d’une procédure d’adoption, pour les primes pour d’un assurance protection juridique, ainsi que la diminution à 30% du pourcentage de réduction sur les libéralité et la fin de l’exonération complémentaire pour les longs déplacements.
- Instauration d’une cotisation distincte de 5% sur les plus-values de sociétés d’investissement dans la mesure où ces plus-values ont été exonérées à l’ISOC. Seraient notamment concernées les SICAV RDT, SICAF et SIR.
La déductibilité du précompte mobilier sur les dividendes versés par de telles sociétés serait par ailleurs conditionnée, dans le chef de la société bénéficiaire, à l’attribution d’une rémunération minimale de dirigeant d’entreprise.
3. Avant-projet de loi introduisant un impôt sur les plus-values sur les actifs financiers
Le gouvernement s’est accordé le 18 juillet 2025 sur un texte concernant l’introduction d’un impôt sur les plus-values : la fameuse « contribution de solidarité ».
Rien n’a encore été déposé au Parlement. A ce jour, il s’agit donc uniquement d’un accord politique et les textes qui ont depuis lors « fuité » divergent.
Suivant le communiqué de presse officiel, il serait question d’une imposition des plus-values au taux de 10% après déduction des moins-values de l’année et d’un abattement annuel de 10.000 euros, voire de 15.000 euros à certaines conditions.
Un régime d’exonération annuelle sur une première tranche de 1.000.000 EUR en cas de « participation importante » (20% min.) serait également prévu. Cette exonération ne s’appliquerait qu’une fois par période de 5 ans. Ensuite, un taux progressif de 1,25% à 10% s’appliquerait.
L’entrée en vigueur du régime ne serait pas prévue avant le 1er janvier 2026.
A suivre…
4. Avant-projet de loi portant réforme du Code des impôts sur les revenus
Le gouvernement s’est accordé le 18 juillet 2025 sur de nombreuses mesures modifiant notre Code des impôts sur les revenus (CIR92).
A ce jour, il ne s’agit que d’un accord politique. Aucun texte n’a encore été déposé au Parlement.
Suivant le communiqué de presse officiel, les mesures « concernent les matières suivantes :
- une augmentation de la quotité du revenu exemptée d'impôt
- une réforme des suppléments à la quotité du revenu exemptée d'impôt et l'imposition des familles
- des adaptations au crédit d'impôt pour revenus de remplacement
- des adaptations au quotient conjugal
- le principe de l'imposabilité du revenu d'intégration (équivalent)
- les heures supplémentaires
- un ajustement technique concernant la rémunération des jeunes sportifs
- une imposition de 33 % pour les pensionnés qui continuent à travailler
- une règle dite « de minimis » pour l'article 90, premier alinéa, 1°, CIR 92
- l'introduction d'une déduction pour entrepreneurs, pour les indépendants sans société
- la suppression de la majoration d'impôt pour insuffisance de versements anticipés pour les indépendants sans société
- les droits d'auteur
- la réduction de la cotisation spéciale de sécurité sociale
- des adaptations au bonus à l'emploi
- d'autres modifications techniques... » (nous soulignons).
A suivre…
5. Avant-projet de loi contenant diverses disposition modificatives techniques ainsi qu’une ratification d’arrêtés royaux en matière de contribution directes
Le gouvernement s’est enfin accordé le 18 juillet 2025 sur un texte concernant de nombreuses dispositions modificatives techniques touchant notamment au Code des droits et taxes divers, au Code des droits d’enregistrement, au Code de la TVA, au Code des impôts sur les revenus….
A suivre….